Parfum qui sent le propre : une tendance qui en dit long sur notre époque.
Pourquoi la mode du parfum qui sent le propre décrit un mood ambiant? De tous temps le parfum a accompagné les bouleversements sociaux, politiques et économiques de son temps. Car le parfum a un pouvoir puissant sur notre humeur.
Il agit donc soit comme un talisman, une armure, un révélateur ou un booster de personnalité pour ceux qui le portent. Il reflète ainsi le caractère des personnes ; mais aussi de son époque qui conditionne la pensée générale.
Par exemple, la cour du roi Louis XIV était connue pour empester (un doux mélange de pestilence corporelle et de parfums capiteux). Mais n’allez pas imaginer que ces parfums sentaient comme ceux qu’on trouve aujourd’hui en parfumerie! A l’époque où le parfum français émerge, les parfums à la mode seraient insoutenables pour le nez d’aujourd’hui. Des ingrédients d’origine animale tels que la civette, le musc tonkin et l’ambre gris étaient très populaires, et sentaient globalement la fesse, le sexe et les excréments.
Pourquoi? Dans la Civilisation des Odeurs, l’historien Robert Muchenbled raconte que ces parfums “virils” reflètent une période violente, de guerre et de conquête. Le Roi Soleil est en effet surtout connu pour sa participation au rayonnement culturel de la France avec Versailles et la quasi-création du luxe à l’époque. Mais il est surtout un roi qui a passé sa vie à faire la guerre à ses voisins.
Les parfums “sales”, à la mode dans les époques guerrières, ont fait place à des parfums plus doux en temps de paix
Vers la fin de sa vie néanmoins, vieux et fatigué (il a eu un règne trèèèès long), Louis XIV ne supporte plus les parfums puissants et ne se parfumera qu’à des eaux légères parfumées aux agrumes et aux fleurs. S’ouvre alors le siècle des Lumières. Une époque gracieuse et délicate où les nobles et bourgeois se rencontrent dans des salons parfumés aux parfums floraux et hespéridés. L’usage du bain se répand sous Louis XV. Et il n’est alors plus considéré comme sexy de sentir la bête en rut.

Pour en revenir à l’époque contemporaine, on peut définir les dernières décennies par un grand mood à chaque fois. Les années 1970s, l’ère du Flower Power et des hippies ont été caractérisées par des chyprés dans tous les sens. Il s’agit de ces parfums mythiques qui sentent la mousse et le patchouli. Les années 1980s arrivent ensuite avec ses excès et ses épaulettes. C’est la période où triomphent les parfums de caractère. C’est aussi une époque de boom économique, de conquête, de surconsommation et de fun : more is more!
Mais quand arrivent les années 1990s, la situation économique et géopolitique n’est plus très rose. Commence alors une grande tendance de sobriété, voire du grunge. Pour situer, c’est l’époque Kate Moss pour Calvin Klein, et des succès du groupe Nirvana. Le maître-mot des parfums de l’époque? Le naturel, l’épure, la fraîcheur… Dans l’anxiété ambiante, on sent un retour à des odeurs rassurantes, qui rappellent la peau de quelqu’un qu’on aime, ou les odeurs d’un chez-soi protecteur.
Les années 2010s : le grand retour des gourmands et des fruités
Les années 2010s sont des années de reconstruction après la crise économique de 2008. La reprise est lente, mais optimiste, et c’est l’époque de l’explosion des réseaux sociaux. Le mood? L’extraversion et le plaisir. YOLO (you only live once) est la devise mi-sérieuse mi-ironique de l’époque. Les grands parfums qui sortent à l’époque sont puissants, mais très loin des personnalités capiteuses des années 1970s ou 1980s. C’est le règne des parfums gourmands (sucrés) et fruités.
Nouvelle décennie, nouveau mood, nouvelle tendance parfum ? L’heure du changement semble avoir sonné. Les nouveaux lancements parfums des grandes marques sont souvent conditionnés par de nombreuses études de marché et des tests consommateurs. (Ce qui impose des limites à la créativité et à la capacité de créer hors des tendances aussi!) C’est pour cela qu’on peut déduire les tendances actuelles en regardant les parfums qui ont récemment été mis sur le marché. La tendance que l’on note, c’est un grand retour des odeurs de propre.
En 2020, d’où vient cette envie de parfum propre, de savon, de peau, de coton, de transparence?
Ces dernières années ont vu l’explosion de la tendance healthy (si on peut encore appeler ça une tendance). Les Français.es ont peu à peu abandonné steak béarnaise-frites, cigarettes, petit coup au comptoir et horreur totale du sport pour un mode de vie plus sain. Et dans tout l’Occident, le mode de vie sain (sport, nourriture saine, méditation, médecine douce…) s’est imposé comme une réponse contre les risques de la vie moderne.

Globalement, les années 2020s commencent sur un gros sujet : l’environnement et sa protection coûte que coûte. Avec la prise de conscience généralisée grâce à des figures ou groupes comme Greta Thunberg ou Extinction Rebellion, la parole se libère et on est bombardés de news anxiogènes. Ce que vous mangez est dangereux. Ce que vous vous mettez sur la peau est dangereux. L’air que vous respirez est dangereux. Et la nature au global n’est pas en forme non plus. La santé mentale, sérieusement attaquée par le stress ambiant, est le grand sujet de société.
Réaction ===> cela commence avec la tendance “hygge“, recette du bonheur danoise, puis l’émergence du concept de “selfcare” (prendre soin de soi). On cherche le confort et la réassurance à tout prix. On veut des odeurs de peau, de coton, de savon, de bébé… Tout pour nous rappeler, en vrac : le linge propre de votre maison (sécurité), le contact tendre d’un être cher (chéri.e, mère, bébé), un champ fleuri (nature sans danger). D’ailleurs, on aura souvent envie d’annuler ses sorties pour rester chez soi. Programme : allumer une bougie, se fourrer dans un plaid et regarder Netflix. La JOMO (joy of missing out) prend désormais le pas sur la FOMO (fear of missing out) de la décennie précédente.
Les parfums “propres” c’est un cocon doux, confortable et rassurant, comme des bras qui vous enlacent ou votre couette qui vous réchauffe. ON KIFFE!!!!
Les ingrédients clés pour un parfum qui sent le propre
Les muscs blancs
Le grand classique du propre c’est les muscs blancs. Leur odeur indéfinissable est ressentie différemment par les gens. Ce qui est sûr, c’est que l’odeur est douce comme du coton, et a un fond sensuel indéniable! Les muscs blancs, c’est ce qui donne une odeur de peau clairement aphrodisiaque, qui fond sur la personne qui les porte et se mêle à sa propre odeur.
Ils sont souvent utilisés pour évoquer l’odeur de la peau, du coton, du linge propre.
La fleur d’oranger
Comme ses copains les muscs blancs, la fleur d’oranger a un côté sensuel certain qui rend intéressantes ses notes pures. La science a découvert semble-t-il que la fleur d’oranger est universellement aimée, contrairement à n’importe quelle autre odeur dont l’appréciation dépend d’une culture subjective et personnelle. Pourquoi? Car elle partage des molécules avec l’odeur de bébé. Cette odeur de peau n’est donc pas 100% “propre” mais évoque une sensation de pureté : celle d’une peau de nouveau né, douce et tendre.
Les aldéhydes
Les aldéhydes sont des molécules synthétiques. (On vous fera bientôt un point sur les ingrédients synthétiques VS les naturels. Et spoiler alert : ne vous attendez pas à un combat à mort entre le Bien et le Mal! Le synthétique est souvent créé à partir d’ingrédients naturels, comme chez nous.). Néanmoins, certaines aldéhydes existent à l’état naturel, notamment dans les ingrédients hespéridés (terme technique pour parler des agrumes). Les aldéhydes ont une odeur savonneuse qui peut parfois être ressentie comme métallique, mais aussi moelleuse et chaude.
Elles sont souvent utilisés pour évoquer l’odeur de la cire de bougie ou encore à celle du fer à repasser chaud.
La lavande
Grand classique aussi de la propreté en Occident, le nom “lavande” vient du latin lavare (laver). La lavande dégage une odeur aromatique, herbacée, et camphrée qui donne aux parfums des notes fraîches et propres. Fun fact : dans l’Antiquité, les Romaines mastiquaient d’ailleurs des brins de lavande pour assainir leur haleine! L’huile essentielle de lavande ayant en plus des vertus calmantes, son odeur procure une sensation de bien-être certain.
Elle est souvent utilisée pour évoquer l’odeur du savon, de la lessive, de la fraîcheur. Autre fun fact : cet ingrédient (sous sa forme naturelle, comme chez Sillages Paris ;)) coûte une fortune, raison pour laquelle on l’appelle “l’or bleu de la Parfumerie”.
La menthe, l’eucalyptus
Pareil, grand classique! Ces ingrédients aromatiques donnent un sérieux coup de fraîcheur à toute formule. Ils sont souvent utilisés dans des parfums toniques, comme une odeur de bonne douche glacée.
La violette et l’iris
Comme la fleur d’oranger, et dépendant de leur usage, la violette et l’iris sont Not That Innocent! Leur odeur est florale et poudrée mais avec un côté boisé pour l’une et terreux pour l’autre qui leur donne aussi une grande élégance. (Si vous voulez savoir, l’Iris aussi coûte une blinde. C’est l’ingrédient le plus cher de la parfumerie, donc elle peut être chic!) Néanmoins, leurs notes poudrées (comme une poudre de maquillage) donnent une grande sensation de douceur.
Alors, curieuse/curieux? Toute collection de parfum mérite d’avoir son parfum cocooning pour se donner la pêche pendant les jours de grisaille! Alors go:
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